Quelques solutions pour acheter à deux sans être mariés ni pacsés

Acheter un bien immobilier en dehors des liens du mariage ou d’un pacs comporte des risques, car en cas de séparation ou de décès, vous ne bénéficierez pas des mêmes textes protecteurs et de règles fiscales clémentes.
Solutions pour un achat immobilier hors des liens du mariage ou de pacs
Il faut faire très attention lors de l’achat d’un bien immobilier à deux, en particulier lorsque l'on n'est ni mariés ni pacsés, car en cas de rupture ou de décès, le statut de concubin expose à de vrais dangers. Par exemple, devoir recourir à un juge pour vendre le logement lors de la séparation si il n'y a pas d'entente entre les 2 personnes ; ou encore perdre tout droit sur le logement partagé avec le défunt, le concubin survivant étant considéré comme un parfait étranger au regard de la loi !
Sans même parler des droits de succession à régler : 60 % des sommes transmises doivent être reversées aux impôts, après un modeste abattement de 1 520 euros. Par comparaison, rappelons que les couples mariés et pacsés, eux, bénéficient d’une exonération totale des droits de succession.
Cependant, pour pallier les risques liés à une acquisition en union libre, plusieurs solutions existent. Chacune comportant ses avantages et ses inconvénients.
1. Acheter en indivision : la solution la plus connue
En achetant un bien immobilier en indivision, vous allez vous partager la propriété du logement. Devant le notaire, vous déterminerez la part du bien que chacun va détenir selon les apports personnels respectifs et/ou la part du prêt immobilier remboursée. Le système est très souple et conduit à un partage à la carte formalisé sous l'expression de « quotités d’acquisition ». Ces quotités fixent le droit de propriété de chacun sur le logement.
Voici un exemple pour illustrer ces propos : pour un achat de bien à 250 000 euros, Madame participe au financement à hauteur de 75 % (187 500 euros) et son concubin, à hauteur de 25 % (62 500 euros) : Monsieur devient donc propriétaire de 25 % du bien, et Madame des 75 % restants.
En pratique, il faut veiller à ce que la répartition figure bien dans l’acte notarié et bien prévoir la rédaction d’une convention d'indivision. Celle-ci détaillera les règles qui vont régir l’indivision en répondant à toutes les situations qui peuvent survenir, comme la séparation ou le décès d’un des concubins. Elle peut être conclue pour une durée indéterminée ou déterminée, dans la limite de cinq ans maximum, renouvelable d’un commun accord.
Mais attention, la solution de l’achat en indivision comporte toutefois quelques désavantages.
En effet, un conflit peut apparaître : nul n’étant tenu de rester dans l’indivision, la vente du bien peut être provoquée par l’un ou l’autre des concubins, qui a même la possibilité de recourir au juge pour trancher.
Autre situation : lors du décès de l'un des partenaires, le concubin survivant peut se retrouver en indivision avec les héritiers du défunt, comme par exemple, les enfants d’une précédente union. À défaut d'indication (donation, testament), rien ne leur interdit alors de réclamer leur part de l’héritage et de contraindre le concubin restant à vendre.
2. Constituer une SCI familiale
Créer une société civile immobilière (SCI) en vue de l’achat d’un bien immobilier permet à chaque membre du couple de détenir des parts sociales à hauteur de son apport. Avantage de la solution : comme dans l’indivision, des règles de fonctionnement sont fixées dès le départ (partage des frais, des impôts…) et les décisions se prennent en commun.
En cas de séparation, le concubin qui le souhaite peut éventuellement racheter les parts de son ex-partenaire. Et en cas de décès de l’un des membres du couple, les statuts peuvent prévoir que la SCI persiste avec le seul associé survivant, qui pourra alors acheter aux héritiers les parts du défunt sans que ceux-ci ne puissent s’y opposer.
Cependant, la création d’une SCI a un coût de création (comptez environ 1 500 euros de frais de constitution de société) et s’accompagne de contraintes de gestion, comme toutes sociétés. C’est-à-dire des formalités à respecter durant toute la vie de la SCI : tenue de registres, d’une comptabilité, convocation d’une assemblée générale chaque année…
3. Prévoir une clause de tontine
Cette clause, qui est à faire figurer dans l’acte de vente lors de la signature chez le notaire, permet de protéger les deux membres du couple après la disparition de l’un d’eux. Concrètement, elle prévoit qu’au décès de la première personne, la part qu’il détient sur le logement revient automatiquement au survivant, qui devient ainsi le seul propriétaire du bien. Cela dans des conditions fiscales avantageuses. En effet, à la place des 60 % de droits de succession exigés entre concubins, ceux-ci tombent à 4,89 % !
Cependant, si elle semble très séduisante en apparence, la clause de tontine a quand même ses limites :
La première étant : la valeur du logement, qui doit constituer la résidence principale du couple, ne peut pas excéder 76 000 euros au moment du décès ! Un plafond non revalorisé depuis des années qui exclut du dispositif la plupart des biens immobiliers.
Ensuite : une fois la clause signée, impossible de rompre la tontine, notamment si le couple ne s’entend plus. Autrement dit, si un problème entre vous survient, à défaut d’accord, vous ne pourrez pas vendre le bien pour récupérer votre part, y compris devant le tribunal. En clair, sauf cas particulier, l’adoption d’une clause de tontine est fortement déconseillée.
4. Opter pour un « démembrement croisé » : une piste à explorer
Afin de garantir à votre compagne ou compagnon la possibilité d’occuper votre domicile jusqu’à la fin de ses jours, dès son achat vous pouvez anticiper en effectuant une acquisition croisée, également connue sous le terme de « démembrement de propriété ». De quoi s’agit-il ?
Chacun des concubins achète en direct, ou via une SCI, la moitié du bien non pas en pleine propriété, mais en nue-propriété (propriété des murs) pour la première moitié et en usufruit (droit d’habiter et de louer le bien) pour la seconde. Pourquoi un tel montage ?
Pour permettre, en cas de décès, au concubin survivant d’obtenir la pleine propriété (réunion de la nue-propriété et de l’usufruit légué) de la moitié du logement. Il restera par ailleurs usufruitier de l’autre moitié. Et ainsi, il pourra continuer à occuper le logement à vie. À savoir : achat démembré en direct ou via une SCI, quelle que soit la solution retenue, sa mise en œuvre requiert l’aide d’un professionnel (notaire, avocat).
5. Rédiger un testament : une précaution incontournable
Quelle que soit l’option retenue : indivision, SCI familiale, achat « démembré », les concubins doivent compléter leur montage par la rédaction d’un testament sur mesure. Une précaution incontournable sachant que, légalement, ils sont considérés comme des étrangers l’un pour l’autre. Résultat, à défaut de dispositions spécifiques (donation, testament), vous n’hériterez pas de votre concubin.
Vos biens reviendront à vos enfants, votre père, votre mère, vos frères et sœurs, avec le risque de devoir quitter et/ou vendre votre logement commun. Un écueil que vous pouvez éviter en rédigeant un testament seul ou devant notaire. Assisté d’un professionnel, vous vous assurerez du respect de vos dernières volontés, en ménageant les droits des autres héritiers tout en protégeant votre concubin.
Vous pourrez notamment prévoir un « testament croisé » par lequel chacun des concubins lègue à l’autre la quote-part qu’il détient sur le logement. Cela garantit au concubin survivant de rester dans les lieux jusqu’à la fin de sa vie, en héritant de la totalité du bien en pleine propriété ou en usufruit.